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Le Conseil Constitutionnel : une institution judiciaire en pleine mutation
Le 30 septembre 2016
Politisée, d'un pouvoir grandissant, l'institution est très controversée
Suites aux dérives du parlementarisme qui ont découlé des IIIème et IVème Républiques, la Constitution du 4 octobre 1958 a institué le conseil constitutionnel afin de combler ces déviances.
- Présentation du conseil constitutionnel
L’article 61 de la Constitution affirme le contrôle du conseil constitutionnel de la conformité des lois à la Constitution avant leur promulgation. Ce contrôle a priori est mis en oeuvre suite à la saisine du Conseil par le Président de la République, par le Président de l’Assemblée Nationale ou du Sénat, par le Premier ministre ou par 60 députés ou 60 sénateurs depuis 1974.
Ce contrôle a priori a vite montré ces limites : malgré les projections, les lois promulguées peuvent bien évidemment jouer un rôle insoupçonné sur la société civile. Hors une fois promulgué, aucun contrôle a posteriori n’était instauré avant 2010.
Lorsque le conseil constitutionnel contrôle la constitutionnalité d’une loi, il ne le fait pas uniquement vis-à-vis de la Constitution, mais face à un ensemble de textes qui forment le bloc de constitutionnalité.
Ce bloc est constitué de :
- la Constitution de 1958
- le Préambule de la Constitution de 1946
- la DDHC déclaration des droits de l’Homme et du citoyen de 1789
- la charte de l’environnement de 2005
Mais aussi d’un support jurisprudentiel :
- les PVC : principes à valeur constitutionnelle
- les PFRLR : principes fondamentaux reconnus par les lois de la République
- les OVC : objectifs à valeur constitutionnelle
Tout ce corpus forme le bloc de constitutionnalité.
- Quel est le rôle concret de cette institution aujourd’hui ?
Depuis 1958, le conseil constitutionnel a vu son rôle de protecteur des droits et libertés s’accroitre considérablement, au point de devenir un acteur majeur de la société civile, autant juridique que politique.
Mais il s’agit également d’une institution controversée : son nouveau Président Laurent Fabius a présenté, le 18 avril 2016 dans un entretien dans Le Monde, sa volonté d’un « renforcement du caractère juridictionnel du Conseil et de rendre plus accessibles ses décisions, son vocabulaire et son style ».
Le 10 mai 2016, le conseil constitutionnel a abandonné la rédaction de ses décisions en « considérants ». En effet chaque décision du Conseil était comportée d’une multitude de paragraphes qui commençaient par « considérant que… ».
Le conseil constitutionnel se modernise, dans le fond et sur la forme, jusque dans le style même de sa rédaction.
Les institutions européennes ont admis, comme la Cour Européenne des Droits de l’Homme la rédaction d’opinions dissidentes à la décision rendue : lorsque plusieurs juges se mettent d’accord sur la décision juridictionnelle à adopter, la décision est prise à la majorité. Si l’un des juges qui composent la juridiction n’est pas d’accord avec la majorité, il peut exprimer son opinion opposée dans la décision rendue.
Laurent Fabius est contre cette expression opposée d’opinion d’un membre du Conseil.
- La nomination des membres du conseil constitutionnel :
Les membres sont garantis d’un statut très indépendant : ils sont nommés pour une durée de 9 ans non renouvelable.
- Trois membres sont nommés par le Président de la République,
- Trois par le Président de l’Assemblée Nationale
- Trois par le Président du Sénat
La véritable incompréhension vient de la nomination à vie et de droit de chaque ancien Président d la République en tant que membre du conseil constitutionnel.
Cette pratique surannée et désuète peut surprendre à l’époque d’aujourd’hui : même le rapport publié par Lionel Jospin le 9 novembre 2012 proposait de supprimer l’appartenance de droit des anciens Présidents de la République au conseil constitutionnel.
Ces membres, très politiques s’il en est, sont d’autant plus sujets aux critiques que le Conseil rend parfois des décisions très politiques.
C’est en effet de son fait que la fameuse taxe Carbone a été censurée dans une décision du 29 décembre 2009; tout comme la célèbre Taxe à 75%, promesse de François Hollande, dans une décision du 29 décembre 2012.