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Commentaire d’arrêt Com 23 septembre 2014 n° 13-17347
Le 23 décembre 2014
Un cautionnement consenti par une SCI à un associé est nul s'il met en danger la société, quand bien même l'acte en question serait conforme à l'objet social
Les faits :
Une société civile immobilière a été créée entre une société mère et ses 2 sociétés filles en 2004, à laquelle un bien immobilier a été confié : en novembre de cette même année, l’assemblée générale extraordinaire des associés a décidé à l’unanimité d’inclure dans l’objet social la possibilité pour la société de se porter caution solidaire du gérant statutaire également associé :
« que le 17 novembre 2004, les associés avaient décidé, à l'unanimité, de modifier l'objet social afin d'y inclure la faculté pour la SCI de se porter caution solidaire en faveur d'un associé et de conférer toutes garanties sur les immeubles sociaux ; que M. X...ayant fait l'objet d'une procédure collective, la Caisse a, sur le fondement de l'acte du 19 janvier 2005, fait délivrer à la SCI un commandement de payer valant saisie immobilière ; »
Suite à cela, la banque a décidé de procéder à une saisie immobilière de ce bien, ce que la SCI conteste au motif qu’elle était contraire à son intérêt social.
La banque réfute cet argument en invoquant à juste titre que le fait que l’assemblée générale extraordinaire ait procédé à l’insertion de la caution dans l’objet social ne pouvait que la rendre conforme à ce dernier.
Or il faut distinguer l’intérêt social et l’objet social : le fait qu’un acte entre dans l’objet social n’interdit pas de le critiquer au motif qu’il est contraire à l’intérêt de cette société. La possibilité laissée de prendre une décision ne signifie pas qu’elle sera saine pour l’entreprise.
La banque pensait donc fournir un prêt sûr d’abord en ce que l’assemblée générale avait élargi l’objet social à l’octroi d’une garantie au gérant, ensuite puisque cette décision a été votée à l’unanimité.
Cependant la légalité d’un acte social peut être contestée au nom de la violation de l’intérêt de la société, en l’espèce il s’agit d’un problème relatif à l’usage personnel du crédit social et de son abus.
Ainsi, une garantie, même entrant dans l’objet social de la société ne dont pas aller au contraire de ses intérêts.
La décision :
La Cour de Cassation rejette le pourvoi au motif que : « n'est pas valide la sûreté accordée par une société civile en garantie de la dette d'un associé dès lors qu'étant de nature à compromettre l'existence même de la société, elle est contraire à l'intérêt social ; qu'il en est ainsi même dans le cas où un tel acte entre dans son objet statutaire ; qu'ayant constaté, par motifs propres et adoptés, que l'immeuble donné en garantie du prêt consenti par la Caisse à M. X...constituait le seul bien de la SCI, de sorte que cette dernière, qui ne tirait aucun avantage de son engagement, mettait en jeu son existence même, la cour d'appel a statué à bon droit ; que le moyen n'est pas fondé ; »
La Cour de Cassation rend ici une solution saine et cohérente : il s’agissait d’un acte anormal dépourvu de rationalité économique.
Même si l’un des pourvois invoqués était la solidarité familiale, cette argumentation ne peut tenir en ce que la société elle même n’en tirait aucun avantage.
La banque aurait du considérer plus sérieusement l’intéret que la société pouvait tirer d’un tel acte, sans se douter du caractère très précaire de la situation qui ne consistait en rien d’autre que de « sauver les meubles » de cette société mise à mal.
En effet, la propriété apportée était celle d’une villa : le risque de la mise en péril de la société est donc réel : privée de son seul actif immobilier, la société deviendrait une coquille vide. Qui plus est, son existence juridique peut également être en danger si l’objet social est limité à posséder un seul immeuble identifié dans les statuts : sa saisie immobilière par un créancier obligera d’envisager une dissolution pour extinction de l’objet social.
Voir l’arrêt :