Action oblique et action paulienne : instruments indispensables aux créanciers
L’action oblique (article 1166 du Code civil) et l’action paulienne (article 1167 du Code civil) sont des actions réservées aux créanciers qui souhaitent reconstituer leur droit de gage général sur le patrimoine de leur débiteur.
En effet, les créanciers chirographaires (non munis de droits spéciaux) sont titulaires d’un droit de gage général sur le patrimoine de leur débiteur. Ce principe découle de l’article 2284 du Code civil :
Article 2284 du Code civil « Quiconque s'est obligé personnellement, est tenu de remplir son engagement sur tous ses biens mobiliers et immobiliers, présents et à venir. »
Deux actions permettent au créancier de reconstituer l’assiette d’un droit de gage de leur débiteur qui ne chercherait pas à garantir (action oblique) voire dégraderait volontairement (action paulienne) leur droit de gage.
- L’action oblique
Prévue à l’article 1166 du Code civil dispose que « les créanciers peuvent exercer tous les droits et actions de leur débiteur, à l'exception de ceux qui sont exclusivement attachés à la personne. »
L’action oblique permet à un créancier d’exercer à la place de son débiteur les droits et actions que celui-ci néglige d’exercer contre son propre débiteur. Elle a vocation à permettre au créancier poursuivant d’exercer toutes les actions patrimoniales dont dispose le débiteur principal.
Des conditions sont à respecter pour sa mise en oeuvre : une créance doit exister, et sa preuve incombe au créancier. De plus la jurisprudence exige que cette créance soit certaine, liquide et exigible.
Peu importe la créance poursuivie, elle peut être assortie ou non d’une sureté : les créanciers chirographaires comme les créanciers privilégiés peuvent exercer cette action.
De plus le créancier doit établir la carence de son débiteur. La Cour de Cassation a avancé comme critère d’établissement de cette carence qu’elle est « établie lorsque le débiteur ne justifie d’aucune diligence dans la réclamation de son dû »
Attention toutefois : cette action présente un caractère collectif : tous les créanciers du débiteur bénéficieront du résultat (positif) de l’action oblique, à égalité avec le créancier poursuivant pour des créanciers de même rang, primant le créancier poursuivant chirographaire s’ils sont privilégiés ou de rang supérieur.
A compter du 1er octobre 2016, l’action oblique trouvera son siège dans le nouvel article 1341-1 du Code civil :
- Art. 1341-1 nouveau – Lorsque la carence du débiteur dans l’exercice de ses droits et actions à caractère patrimonial compromet les droits de son créancier, celui-ci peut les exercer pour le compte de son débiteur, à l’exception de ceux qui sont exclusivement rattachés à sa personne.
- L’action paulienne
L’action paulienne permet à un créancier d’attaquer les actes que son débiteur a accomplis en fraude de ses droits et de faire déclarer inopposables à son égard toutes les opérations par lesquelles le débiteur a frauduleusement diminué la consistance de son patrimoine afin de le soustraire aux poursuites.
Contrairement à l’action oblique, le créancier agit en son nom personnel et n’exerce pas l’action de son débiteur.
Elle trouve son siège dans l’article 1167 du Code civil : « (Les créanciers) peuvent aussi, en leur nom personnel, attaquer les actes faits par leur débiteur en fraude de leurs droits.
Ils doivent néanmoins, quant à leurs droits énoncés au titre "Des successions" et au titre "Du contrat de mariage et des régimes matrimoniaux", se conformer aux règles qui y sont prescrites. »
La fraude du débiteur exige de démontrer un élément objectif : un acte d’appauvrissement ou d’aggravation de l’insolvabilité de la part du débiteur.
Un élément subjectif nécessite également d’être rapporté : le débiteur doit avoir l’intention ou la conscience de nuire à ses créanciers.
L’action paulienne n’a pas pour effet d’annuler les actes frauduleux mais de les déclarer inopposables aux créanciers. Elle est généralement dirigée contre le tiers et non contre le débiteur.
Cette action se trouvera au sein de l’art 1341-2 nouveau du Code civil à compter du 1er octobre 2016 :
« Art. 1341-2. – Le créancier peut aussi agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d’établir, s’il s’agit d’un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.